L’activité Supply Chain, de part sa dimension intrinsèquement transversale, se retrouve de plus en plus au cœur de l’entreprise. Clé de voûte de l’entreprise, cette position transverse et centrale conduit souvent le manager Supply Chain à être la cible des autres services lorsque les performances ne sont pas au rendez vous (objectifs commerciaux non atteints car rupture de produits, production perturbée car fournitures mal approvisionnées etc.). Mais c’est également lui qui permet à ces autres services de travailler sereinement lorsqu’il réalise de bonnes performances. Il a ainsi le rôle de cristallisateur des attentes et des exigences. La pression est donc forte pour que ses résultats soient toujours améliorés.
La majeure partie des opérations logistiques fait intervenir les hommes de manière importante.
La composante « humaine » est ainsi fortement contributrice dans les activités logistiques (manutentionnaire, responsable entrepôt, gestionnaire de stocks etc.).
En Supply Chain plus qu’ailleurs, cette dimension « gestion de l’humain » constitue souvent un levier potentiel d’amélioration et d’optimisation important. Et donc des sources de gains conséquents. Il est ainsi souvent plus facile, et moins coûteux, d’activer ce levier là dans un premier temps, avant de se lancer dans de gros chantiers longs et coûteux, comme le déploiement d’un nouvel ERP ou de construction d’un nouvel entrepôt. On a souvent à l’esprit que le fait de mettre en œuvre d’importants changements va permettre de gagner énormément. Il est vrai que ce sont les changements profonds qui apportent sur le long terme. Cependant, il est faux de croire que cela peut se faire simplement.
Activer, dans un premier temps, des leviers purement de« management », comme l’adaptation des organisations ou encore le challenge des performances des équipes, deux leviers forts, souvent sous-exploités, peut être une solution dans la recherche d’amélioration des performances opérationnelles.
Voici les quelques bons principes qu’il nous paraît important de respecter :
- Définition d’indicateurs opérationnels
- Amélioration au quotidien de ces indicateurs
- Mise en œuvre d’évolutions dans la façon de travailler en local
- Étude des évolutions ou des changements complets d’outils (outil informatique par exemple)
- Mise en œuvre de ces évolutions
Les indicateurs serviront de moyen de mesure tout au long de ce parcours : ils permettent de savoir quel était le niveau de départ et de se fixer des objectifs à chaque étape.
1- Définition d’indicateurs opérationnels
Lors de cette étape, il est important de faire en sorte que les indicateurs définis soient à la fois concrets pour les personnes du terrain et en même temps qu’ils permettent une vraie évaluation. Il convient de s’assurer, par exemple, que les aspects de qualité et de productivité (délai et coût) sont représentés. A chaque indicateur, il faut désigner un responsable qui devra garantir son bon niveau et l’afficher clairement.
Voici un exemple « classique » d’indicateurs en logistique opérationnelle :
- Nombre de lignes traitées en préparation de commande
- Nombre d’heures dépensées sur la préparation de commande
- Déduction de la productivité en ligne/heure
- Taux d’erreurs de préparation (détectées au contrôle qualité par exemple) Les aspects productivité et qualité sont ici bien liés.
2- Amélioration au quotidien de ces indicateurs
L’affichage de l’indicateur au quotidien est le premier levier permettant de voir une amélioration tangible du niveau de performance. Cet affichage permet en effet d’avoir une vision claire des moments où l’équipe réalise un travail efficace ou, au contraire, les moments où le travail est moins performant. On peut ainsi être exigeant en conservant des évaluations factuelles, dans une dynamique de transparence et de motivation collective.
Typiquement, sur l’exemple du point 1, un suivi précis au jour le jour permet de dégager rapidement une double cible à atteindre en termes de productivité et de qualité. Lorsque le travail est moins performant (en productivité), il doit y avoir une explication : faible nombre de lignes ? Perte de motivation des équipes ? Problèmes particuliers (panne, etc.) ?
3- Mise en œuvre d’évolutions dans la façon de travailler en local
Lorsqu’on suit un processus avec des mesures précises, on détecte plus facilement les problèmes et donc les améliorations à mettre en œuvre. Les équipes terrain sont d’ailleurs souvent force de proposition sur ces améliorations à déployer ! Il est donc important de mettre en œuvre des propositions réalistes. Pour les améliorations les plus simples ne nécessitant aucune étude particulière, leur mise en œuvre peut même être assez rapide. A ce stade, le manager Supply Chain peut s’appuyer sur l’expérience de ses équipes, faire ressortir des bonnes pratiques, et permettre à ses collaborateurs de mettre en œuvre leurs propres idées.
Cette démarche « cercle vertueux » a également l’avantage d’améliorer encore plus leur performance. Bien entendu, les indicateurs doivent montrer ces progrès. Ainsi, les problèmes particuliers qui pouvaient être source de perte de performance vont peu à peu être éliminés. Par exemple le nombre de pannes sera de plus en plus faible car les machines et/ou outils sont mieux entretenus…
Les équipes trouveront d’ailleurs d’elles-mêmes les moments les plus opportuns pour faire ces opérations de maintenance préventive. De la même manière, le contrôle qualité permettra de dégager des erreurs récurrentes qui pourront être éradiquées à la source par des moyens simples tels que des affichages ou des formations.
4- Étude des évolutions ou des changements complets d’outils (outil informatique par exemple)
C’est à ce stade que l’entreprise peut mettre en œuvre des changements, des évolutions plus profondes de manière pertinente. En effet, les équipes se trouvant déjà dans une optique d’amélioration et de changement, l’entreprise possède ainsi une dynamique pour enclencher des bouleversements de fond. Pour changer un outil structurant (ERP, APS etc.), l’entreprise et ses employés doivent clairement se poser des questions sur leur propre organisation et leur façon de travailler.
En tant que cabinet de management, nous travaillons d’ailleurs régulièrement pour accompagner les entreprises dans ce type de démarche. En effet, les compétences ne sont pas toujours présentes ou disponibles au sein de l’entreprise et on sait également qu’un œil extérieur et connaisseur peut beaucoup apporter à ce type de réflexion.
5- Mise en œuvre de ces évolutions
La mise en œuvre des évolutions les plus complexes et structurantes peut alors se faire de manière beaucoup plus cohérente. Les indicateurs permettent rapidement de mesurer si les changements apportent des performances notables. En général, les évolutions sont testées en prenant un périmètre restreint avant d’être validées et déployées. C’est essentiellement via les indicateurs recensés qu’on mesure l’efficacité et les gains de l’évolution. Cela permet de mieux déterminer comment doit se réaliser la mise en œuvre sur l’ensemble du périmètre. Enfin, les responsables devront, à nouveau rechercher de nouvelles améliorations et gains visibles grâce aux indicateurs, terminant ainsi la boucle vertueuse.
En conclusion, il ressort de ce constat que l’évaluation des performances et l’appropriation par les équipes permettent de réelles améliorations. Une des pratiques régulièrement constatée est de proposer aux salariés une rémunération variable, liée à l’atteinte de leurs objectifs. L’entreprise gagne grâce à la performance de ses salariés et les rétribue en conséquence. Ce concept assez simple permet de lier très concrètement les gains d’une entreprise et les gains de ses salariés.
Jean-Pascal CHICHMANIAN